Le DPE favorable au gaz, il est question de le faire évoluer
Une proposition de loi au Sénat envisage une révision du mode de calcul du DPE, qui relèverait le classement énergétique des logements chauffés à l'électricité. Le but serait de diminuer drastiquement le nombre de passoires thermiques.
Favoriser les logements chauffés à l'électricité
Depuis longtemps au cœur des débats, le DPE suscite de nouveau la polémique avec l'annonce récente de Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique, sur la modification du mode de calcul du DPE. Cette réforme, qui ciblerait les biens de moins de 40 m2, permettrait de faire sortir de la catégorie des passoires thermiques quelque 140 000 logements.
Bruno Le Maire, ministre de l'Économie et des Finances, chargé depuis peu des questions énergétiques, lui a emboîté le pas en déclarant qu'il misait sur une diminution « par centaines de milliers » du nombre de logements classés en passoires thermiques, en notant de façon plus favorable les logements chauffés à l'électricité. Le chauffage au gaz est actuellement privilégié par le calcul utilisé pour établir les DPE, et un logement chauffé au gaz qui passe à l'électricité peut faire basculer le bien en passoire énergétique.
La stratégie proposée serait d'avantager les biens chauffés à l'électricité en modifiant la méthode de calcul du DPE. Celle-ci serait revue en abaissant le CEP (coefficient d'énergie primaire) de l'électricité pour l'aligner sur celui des énergies fossiles (fioul ou gaz), ce qui relèverait automatiquement le classement des biens chauffés à l'électricité.
Des points de vue contradictoires sur la performance énergétique
Après une première réforme en 2021, qui a déjà corrigé le CEP (coefficient d'énergie primaire) en le faisant passer de 2,58 à 2,3, deux sénateurs de Haute-Savoie proposent aujourd'hui de le supprimer purement et simplement. Ils estiment que ledit CEP alourdit injustement la note des DPE des biens chauffés à l'électricité, et qu'un million de ces logements auraient été classés à tort en passoires thermiques.
Selon les défenseurs du chauffage électrique, celui-ci présente pourtant de multiples avantages : pas d'émission de CO2, facilité d'installation, pilotage possible à distance, etc. Dans leur argumentaire, les deux sénateurs estiment par ailleurs que le CEP actuel a un impact négatif sur l'amélioration des logements.
Certes, les pompes à chaleur préconisées par le gouvernement utilisent l'électricité, mais cette solution présente des inconvénients souvent rédhibitoires, tels que le coût important qu'il représente pour de nombreux ménages, les difficultés techniques, le frein des réglementations de copropriété ou des sites protégés.
Selon les parties prenantes du projet, le CEP dans sa forme actuelle peut donc avoir de lourdes conséquences sur la location ou la vente potentielle d'un logement, notamment à l'horizon 2025 ou 2028, dates de durcissement de la réglementation sur les logements mal classés. Ils considèrent comme inadapté un diagnostic qui prend en compte l'énergie primaire pour l'évaluation de la qualité thermique d'un logement, car cette expertise ne donne pas d'informations suffisamment précises sur la performance énergétique du bien.
Bercy tient cependant à souligner qu'il ne s'agit pour l'instant que d'une proposition de Bruno Le Maire, qui devra être arbitrée avec d'autres membres du gouvernement. Certaines associations ont déjà réagi à cette initiative. Brice Lalonde, ancien ministre de l'Environnement et président d'Equilibre des Energies a ainsi déclaré : «Le Gouvernement a raison de vouloir rouvrir le dossier du DPE à la lumière des imperfections constatées. Si le changement de méthode pour les petites surfaces semble acquis, il faut également, comme le propose Bruno Le Maire, réviser le coefficient de conversion de l'électricité en énergie primaire qui pénalise injustement les logements chauffés à l'électricité y compris ceux qui sont équipés de pompes à chaleur. Ce sont pourtant les mieux isolés du parc.»